Partir, oui. Mais il faut aussi (malheureusement) revenir

Il y a quelque temps, je partais pour 2 mois en sac à dos. Je quittais mon emploi, réglais mon budget et prenait soin de ma copine, question de moins s’ennuyer… L’aventure m’attendait

 

L’aventure? Mets-en. 33 jours à marcher Compostelle, se perdre dans les Pyrénées et sacrer comme jamais contre la grêle, avoir faim, être fatigué. Chercher un refuge, pester contre la pluie, manquer d’eau. Mais aussi, et surtout, s’émerveiller devant des villages que jamais je n’aurais visités autrement. Des perles prises dans le temps. Des paysages à couper le souffle. Des vignobles, ceux du Rioja à perte de vue. Manger et boire comme si c’était la fête tous les soirs.

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Des bornes, encore des bornes.

J’étais seul et bien. De plus, comme partout ailleurs, le nord de l’Espagne tombe en léthargie entre 13h00 et 16h30, donc j’avais l’impression de marcher dans des villages fantômes. Comme je marchais souvent seul, par choix, vous comprendrez que c’était le silence et la paix partout. Le bonheur après avoir quitté un emploi où les gens n’appellent que pour se plaindre.

Après ces 33 jours, le Portugal, le centre de l’Espagne et l’Italie m’ont accueilli à bras ouverts. Plus mouvementé, mais toujours aussi agréable. Bouffe, vin, architecture et histoire étaient au rendez-vous. La liberté après avoir quitté un emploi où les gens n’écrivent que pour se plaindre.

Mais toute bonne chose a une fin. Il fallait que je revienne. Parce que j’avais envie, parce que ma vie est ici et aussi, parce mon portefeuille se vidait de plus en plus.

Le choc.

Je suis resté une semaine enfermé à la maison sans vouloir y sortir. Je recevais des invitations à aller prendre un verre, mais je refusais. Je suis bien entouré, alors tout le monde comprenait. Peu à peu, je sortais de ma coquille, forçaient ses rencontres. Pas que je n’avais pas envie, mais surtout parce que je ne voulais pas briser cette zénitude, cette magie qui s’était installée en moi. Je ne voulais pas revenir à la réalité. Je voulais rester sur mon nuage. J’avais l’impression que si je parlais, que je racontais mon voyage, personne ne comprendrait. Mais en réalité, peut-on vraiment être réellement compris? Je veux dire, pour les gens qui n’ont jamais osé tout quitter et partir marcher, vivre au gré du chemin, c’est difficile à comprendre, à imaginer.

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Un selfie ombragé

Attention, je ne suis pas en train de me placer dans une classe à part. Nous avons tous le pouvoir de faire quelque chose qui nous sortira de notre zone de confort. Mais si quelqu’un vient me parler de la vague qu’il a prise lorsqu’il a surfé en Californie, je serais très certainement enthousiasmé, mais je ne pourrais pas imaginer les émotions, le stress, la joie qu’il a vécus. Nous sommes spectateurs des histoires des autres.

C’est tout ça que je voulais garder pour moi. Par pur égoïsme? Avec le recul, très certainement. Ce voyage, je l’avais vécu seul et seul moi pouvais comprendre. Prétentieux n’est-ce pas? Pourtant…

J’ai eu la chance de faire de superbe rencontre là-bas. Tous, ou à peu près, m’ont demandé comment j’envisageais le retour. Je ne savais pas quoi leur répondre. Je me disais que ce n’était pas le moment d’y penser, mais cette ‘peur’ faisait son chemin elle aussi. Je marchais et des fois je me surprenais à penser : ‘comment vais-je réagir à mon retour? Comment vais-je vivre ce retour?’ Et bien, soyons honnête, c’est difficile. Même très.

Une première borne.
Une première borne.

Je ne suis pas le premier et ne suis pas le dernier à vivre ces moments. Depuis mon retour, à quoi je pense? À repartir bien sûr. Il y a un sentiment d’extrême liberté que de ne pas savoir où dormir quand on quitte le matin, rien n’est routine et tout est nouveau, tout est émerveillant, tout est libre.

Alors qu’est-ce que j’ai fait? J’ai dormi. J’ai lu, j’ai fait du lavage, la cuisine, bref, je me suis occupé. Je ne sais pas si c’est le secret, mais à quatre semaines de mon retour, j’en suis encore à essayer d’échapper à cette routine qui reprend son dû, qui reprend le temps que je lui ai fait perdre. Je prends du mieux, une heure à la fois, comme sur le chemin. Mais je ne peux m’empêcher de rêver, non, penser, à mon prochain départ.

Ah oui, j’oubliais, je suis retourné à cet emploi où les clients n’appellent et n’écrivent que pour se plaindre. Il faut que je paye mon prochain voyage!